Il n’y a pas de peuple sans histoire, comme il ne peut pas y avoir de société sans mémoire. La chose la plus subversive qui puisse arriver à un peuple est sa déconnexion de son paradigme historique. En l’occasion de la fête du drapeau et de l’université, Ricarven OVIL, à travers cet article d’INTERMED, fait le point sur la situation d’Haïti.
On ne peut pas juger un poisson sur sa rapidité à gripper un arbre encore moins un éléphant sur son aptitude à voler. Cela dit, un jugement fondé doit toujours prendre en compte les valeurs intrinsèques du sujet jugé. Dans le cas contraire, ce ne sera qu’un jugement loufoque. Habituellement, on traite Haïti de pays pauvre, on la catégorise parmi les pays du tiers monde mais pire encore, des pays du quart monde selon un paradigme économique et matériel. Mais aux faits, les valeurs intrinsèques de cette presqu’île dépassent le matériel. Et trop souvent, même les fils et les filles de cette terre oublient son histoire glorieuse, minimisent le poids de son vécu. Cet article se veut de remémorer une parcelle de notre histoire en l’occasion de la fête de notre bicolore. L’exploitation de l’homme par l’homme érigé en système prévalait bien longtemps avant J.C. Il a fallu attendre le 15e siècle quand les espagnols débarquèrent sur cette presqu’île qu’ils qualifièrent plus tard d’Hispaniola et décidèrent acharnement d’en prendre possession en réduisant les Indiens, habitants d’alors, en esclavage sur leur propre territoire. Les Indiens n’habituant pas à ce travail ardu, ont été génocidés et remplacés dans le temps par les Africains sous l’égide de la métropole française. Cette métropole française a édifié un système esclavagiste complexe reposant sur la supériorité de la race blanche à la race noire,traitant les noirs de biens meubles croyant qu’ils n’avaient pas d’âme. Comme disait l’autre, une âme si blanche ne peut pas être dans un corps si noir. En plus de trois siècles, ce système bien monté a exploité les noirs, les tuant à volonté jusqu’à ce qu’une succession de mouvements insurgés a conduit vers l’indépendance nationale. Arrêtons-nous un peu sur le concept d’indépendance. A l’époque dont nous parlons, les noirs étaient tous condamnés à l’exploitation et à l’esclavage même dans les coins les plus reculés de la terre. Le système était tellement robuste que la liberté délibérée des noirs était un acte illégal. Nos ancêtres ont trouvé le moyen de vaincre ce système complexe, robuste et puissant par une guerre coloniale sanglante. Ils ont mis les forces armées métropolitaines hors de nos frontières et les ont empêchées d’y revenir. Cette révolution était illégale, l’indépendance nationale constituait une inquiétude grandissante pour les puissances coloniales d’alors puisque qu’Haïti était la seule terre où les noirs étaient libres. La jeune république, comme disait Abbé Grégoire, s’élève comme un phare au niveau de l’Amérique et toutes les colonies ont eu les yeux fixés sur la nouvelle terre libre des noirs de sorte qu’un processus d’haïtisation était à l’œuvre partout et ailleurs. Toutes les colonies voulaient faire comme Haïti, toutes volaient leur indépendance. A partir de cette portion d’histoire, faisons ressortir trois points importants :
Toussaint Louverture, le premier noir rentré dans la galerie des grands hommes. Reconnu universellement comme l’un des grands Hommes de tous les temps, stratège et brillant. Lamartine disait que cet Homme est une nation. Est au-dessus de tous, disait Wendel Phlipps, au-dessus de Napoléon, de Washington, de John Brown… Il faut mettre le nom de martyr de l’homme d’état dans le ciel bleu ‘Toussaint Louverture’. C’était l’un des rares esclaves qui avait non seulement un projet de révolution mais plus encore un projet d’élaborer une constitution. Jean Jacques Dessalines, chef des armées indigène après le kidnapping de Toussaint Louverture,a mené le combat vaillamment contre la toute-puissance française. Père fondateur de l’indépendance nationale. Henri Christophe, le bâtisseur. L’homme de discipline qui a pu construire en moins de seize ans tant de grands édifices dont nous voyons à nos jours les vestiges, en particulier, la citadelle Laferrière qui est classée par l’UNESCO comme l’une des merveilles du monde. Quelle qualité d’homme… !
Il faut préciser que toutes ces entreprises ont été emmenées avec brio et aussi à nos frais. Car, les partisans de l’esclavage, les grandes puissances coloniales du moment n’ont pas cessé d’essayer de casser l’élan haïtien. Prenons deux exemples pour illustrer cette assertion :
La liberté et l’indépendance ne nous ont pas été données. On les a conquises au péril de notre vie. Cette révolution était une avanie, un soufflet, une vexation pour les puissances coloniales et jamais, elles ne nous ont pardonné. Je ne suis pas angélique dans ma conception de notre identité originelle. Je sais actuellement qu’Haïti végète. Cette cassure, cette chute éclatante est découlée de deux choses :
Dans cette conjoncture alambiquée, il ne devrait pas y avoir de vie dans ce pays. Et pourtant le quotidien haïtien ne cesse d’émerveiller. Malgré toutes ces conspirations externes et internes contre nous, nous sommes encore debout. Nous sommes résistants, résilients, courageux, forts et brillants. Peu de temps après le tremblement de terre le plus dévastateur jamais arrivé, les Haïtiens rapidement se reconstruisent psychologiquement, debout à la poursuite de la survie dans un paysage dévasté. Quelle ossature psychologique ! Les Haïtiens qui ont eu la chance d’aller étudier ailleurs deviennent facilement des sommités internationales dans tous les domaines à l’instar du Dr Henri Ford actuel doyen de l’université de Miami. D’autres ont fondé des grandes villes à l’instar de Jean Baptiste Pointe du Sable le Saint-Marcois, fondateur et premier habitant de Chicago. La situation difficile d’Haïti contraint le peuple dans l’errance mais partout où nous allons, nous participons à l’essor, au développement et à la construction. Nous avons donné à Saint- Domingue un support sans égal dans son processus de développement, une fois satisfaite elle nous rejette. Actuellement, nous sommes en train de fournir une main-d’œuvre servile à bon marché au Brésil et au Chili. Nous sommes un peuple d’histoire. Nous sommes un grand peuple. Nous avons fait ce qu’aucun peuple ni personne n’a su faire avant nous, même Hannibal encore moins Spartacus. Nous avons, nous-mêmes, frayé la voie de la liberté. Nous avons fait l’histoire en défiant les grandes puissances de jadis. Nous, les Haïtiens, ne sommes pas le commun des mortels. Nous sommes des Héros depuis et pour toujours. Je ne suis pas candide dans ma compréhension de l’haïtianisme. Je ne me suis pas laissé illusionner par les réalités de sorte que je les vois telles que je suis et non telles qu’elles soient. Tout le monde sait qui nous sommes, connait nos capacités de réalisation. Est-ce pourquoi il inhibe nos entreprises et conspire à ce qu’on demeure dans les conditions infrahumaines. Un jour, une conscience collective sera dressée, une union inéluctable sera construite et nous serons à nouveau, auteurs d’un évènement plus grandiose, plus merveilleux et plus splendide que 1804. La force d’un peuple est incrustée dans sa mémoire, dans son histoire. La nôtre contient tous les ingrédients nécessaires pouvant nous permettre de regagner notre place au concert des nations. Ricarven OVIL DCEM2
1 Commentaire
Jean Guito, ovil
18/5/2018 09:52:04 am
Nap batay..
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INTERMED
Un rêve qui a pris forme depuis le Nostradamus (journal non officiel qu'avait formé la promotion actuelle d'internat quelques années plus tôt) et qui se fait à présent tradition pour les promotions à venir. Suivez nous sur Instagram : @_intermed_ Archives
Mai 2019
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