Excusez-moi si à mon humble avis ceci est un paradoxe vicieux… Oui il y a l’insalubrité, le soleil, le milieu ambiant, l’analphabétisme, l’insouciance, la désinformation, le chômage, le devoir, le désir de se faire de l’argent, tout ceci pour caractériser ce qui s’y passe et pire encore le contexte dans lequel ceci s’y fait. Mais soyons honnête, nous ne pouvons pas nous fourvoyer pour de gros locaux, de l’air climatisé ; ce n’est qu’encore un marché mais en plus sophistiqué. Pourquoi refuser l’achat des médicaments dans les rues, en face des marchés publics et paradoxalement accepter les pharmacies logées dans les supermarchés ? Évidemment, nous ne parlons pas de la même clientèle. Là encore, il faudrait se demander si au bout du compte, on ne ferait pas de la propagande pour une santé de riche et une santé de pauvre ? Serait-ce parce que ce sont les pharmaciens qui le font et non ces hommes, charlatans qui n’ont presqu’aucune idée du produit qu’ils ont en main ? Serait-ce parce que l’espace est plus attrayant, plus attirant et donc acceptable ? Serait-ce une méthode pour répondre à la meilleure accessibilité dont les gens se plaignent à longueur de journée ? Je ne pense pas car en faisant cela nous enlevons le pain quotidien des mains de pauvres gens désireux de faire un peu d’argent pour répondre aux besoins de leur famille sous la mauvaise gouvernance d’un ministère de santé pour qui la priorité n’est pas encore prioritaire.
N’allez pas croire que je veuille en revanche me pencher du côté de ces gens qui font du tort à la santé d’un peuple livré à lui-même. Au contraire, je veux me battre corps et âme contre ce fléau mais ce n’est vraiment pas en détruisant ce marché illicite de cette manière et en favorisant l’émergence de l’autre que vous porterez une solution à l’usage irrationnel des médicaments par la population car vous ne ferez qu’enrichir les poches de ceux qui ont déjà de l’argent car, ces officines que vous officialisez dans les supermarchés n’appartiennent pas au pharmacien qui s’y trouve, ni à celui qui signe l’autorisation, mais plutôt au propriétaire du supermarché qui se charge de fixer les prix à sa manière, comme s’il s’agissait d’un vulgaire bonbon et ceci le plus souvent à l’insu du pharmacien en chef, celui qui est soi disant chargé de s’occuper de sa pharmacie. C’est se battre contre ces babels infernales, que ces marchands ambulants transportent sous le lourd fardeau du soleil, qui ne font qu’exposer la pauvreté et tomber dans un bel espace bien propre à l’abri du soleil, de la poussière pour venir acheter ces même bonbons, sucreries, mais en plus chers car sans l’ombre d’un doute, il faut payer pour la beauté de l’espace ! Comment un pharmacien peut-il accepter que l’on fasse autant de tort à sa science, son dû? Doit-on remplacer nos officines par des espèces de conglomérats difformes attenant aux étalages de fruits et légumes de supermarché ? Comment peut-on vendre des papiers toilettes, des insecticides, et tant d’autres articles encore au même endroit que les substances destinées à prévenir, guérir les maladies des humains ? Comment accepter d’allier au même endroit : produits comestibles et poisons ? Pire encore c’est quand trop de monde fait la queue dans les comptoirs habituels et qu’on demande au pharmacien de passer le produit sur le sien puisqu’il est enregistré dans le système du supermarché. La pharmacie a toujours été un métier libéral alors ne venez pas me dire que pour une maudite somme d’argent (ne dépassant parfois pas 30 000 gourdes) vous êtes prêts à sacrifier ces années d’études et tuer une si belle profession. Oui effectivement il y en a qui diront : Mais on a l’habitude de trouver des médicaments dans les supermarchés à l’étranger…Alors qu’est-ce qu’il raconte celui-là? Je reviens en vous disant de bien observer et de vous poser cette question : Quels médicaments vend-on dans ces supermarchés ? Non pas des antihypertenseurs, des psychotropes, des antiépileptiques, les drogues fortes mais plutôt les OTC (over the counter) communément connus sous le nom de médicaments en vente libre, que l’on peut se procurer sans une prescription médicale, qui sont disposés sur une étagère assez haut pour éviter que les enfants puissent s’en accaparer et accessible pour les gens à mobilité réduite. Oui, c’est ainsi car à chacun son métier… Nous ne pouvons pas nous permettre de telles dérogations pour des bâtiments destinés à mystifier le crime qui s’y fait. Car de toute manière, l’essentiel n’est pas d’avoir un pharmacien sur place, et penser que tout va pour le mieux, que tout s’arrête là ; c’est d’ailleurs l’ironie de toute l’histoire . Il ne s’agit pas d’une simple pharmacie car la pharmacie n’est pas une boutique où vous venez faire vos emplettes comme on tend à la voir, mais plutôt un espace où un professionnel du médicament vend des substances nocives, si elles sont prises inutilement ou bénéfiques dans le cas contraire pour l’organisme humain dans un but bien précis. Il ne faut pas voir le côté vente uniquement ou le côté pharmacien disponible mais surtout voir l'aspect éthique et moral de la question. La meilleure chose serait tout simplement que les pharmaciens prennent conscience de la valeur de leur métier et qu’ils le fassent correctement, qu’ils remplissent leur rôle de conseiller pour aider les gens à prendre conscience du danger que représentent les médicaments car parfois dans certaines cliniques mobiles vous avez des gens qui vous supplient de leur en donner même s’ils sont en bonne santé apparente, comme s’il s’agissait de sucreries. Le médicament est une arme à double tranchant qui peut tout aussi bien guérir mais également tuer ! Pour mettre fin à la vente illicite des médicaments dans les rues, il suffit d’éduquer la population et offrir aux marchands ambulants une meilleure source de revenus, de bloquer ces « gwo zouzoun » qui financent à de mauvaises fins ce marché, de revoir les lois pharmaceutiques vieilles de plusieurs années de façon à protéger la profession et prendre des mesures radicales contre les rebelles car l’usage irrationnel des médicaments est un problème de santé publique et nous concerne tous autant que nous sommes. Jean Duvenick Pharmacien
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